On ose? Question rituelle du moment. Se refaire la bise? Le bec. Les trois smacks. On ose, mais on ne doit plus. Nos muqueuses à quelques centimètres d’autres muqueuses. Buccales. Nasales. Vous l’aurez compris, en ces temps, la bise – qui était revenue en force – est plus sale que le mot qui lui ressemble et, pour certains, tout aussi rare. Pire, le geste passe pour inconséquent, inadapté, dépassé.

La bise c’est un vrai tremplin à Covid. Et une autoroute pour tous les autres virus hivernaux. Il semblerait toutefois que cette antique pratique, dérangeante de longue date pour beaucoup, agréable et incontournable pour d’autres, soit moins dangereuse (pour autant que la bouche demeure pincée) que le serrage de mains. Surtout quand les phalanges qui se mélangent ont d’abord fait un détour par un orifice, nez, bouche, œil… normalement et c’est suffisant.

Je passe sous silence les désastreuses conséquences du salut esquimau – assez peu usité par chez nous il est vrai – qui consiste en un nez-à-nez tout serré frotté et qui vous assure de renifler tout ce qu’il y a attraper chez l’autre. Mais je vous déconseille par-dessus tout de vous rabattre sur le faussement anodin baisemain, tradition en perte de vitesse depuis un siècle et c’est tant mieux pour la survie de l’espèce. Le contact lèvres et mains y atteint le paroxysme de la promiscuité à déconseiller. Autant lécher les doigts de la personne qu’on rencontre s’il faut illustrer la hauteur du risque que l’on prend en voulant se démarquer par cette pratique surannée.

Alors on va faire comment dorénavant? Ben officiellement et sanitairement parlant, il faut plus que jamais continuer à se scruter de loin avec un salut tout aussi distancé. Présenter le poing à un autre poing. Ou se renifler l’arrière-train protégés que l’on est ainsi par un face-à-face rendu ainsi impossible.

A chacun de choisir, en accord, bien sûr, avec son vis-à-vis. Mais le seul moyen de s’en sortir avec responsabilité, élégance et sans passer pour un ignare c’est d’éradiquer la bise, même avec la phrase introductive «on est vaccinés alors on peut». Et de lui préférer, un chaste «pas encore.»

De toute façon, depuis qu’on est passé à travers la grippe l’an dernier en renonçant à se toucher, on sait qu’on ne bisera plus jamais sans risque. Et qu’on était ni plus ni moins que des héros – certes peu renseignés – d’oser le faire jusqu’en 2020.

Dans le viseur de Stéphanie Germanier: Alors, on bise plus