El Diez s’en est allé, à peine ses 60 automnes passés, au bout d’une vie qui a tutoyé l’or et le plomb. Diego Armando Maradona, c’était un footballeur de génie mais pas seulement. Il y avait son pied en or mais aussi sa gueule tantôt angélique tantôt vociférante. Une personnalité à la folle ambivalence dont se sont emparés les créateurs avec délectation. Jamais footballeur n’aura suscité autant d’œuvres d’art et ce, dans le monde entier.

«Admirer un tel champion, c’est admirer la poésie, l’art abstrait, sans aucun contenu rationnel», confessait le Prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa. Ce gamin né sans le sou dans un bidonville des faubourgs de Buenos Aires deviendra une légende vivante au prix d’un parcours alternant la gloire et la déchéance, le génial et le sordide. De l’or en barre pour les artistes. Chansons, fresques, films, livres, «El Pibe de Oro» a entraîné une véritable fièvre créative depuis des décennies. Petit florilège non exhaustif de films, livres, chansons et autres productions qui rendent hommage à un personnage plus grand que sa vie.

Légende du football, icône du cinéma

Le parcours hors norme de l’Argentin a inspiré de nombreux réalisateurs qui l’ont porté sur le grand et le petit écran. Dernier en date, le fascinant documentaire que lui a consacré en 2019 le Britannique Asif Kapadia présenté hors compétition au Festival de Cannes. Sobrement intitulé «Diego Maradona» et centré sur la période napolitaine, il dresse le portrait passionnant d’un dieu du ballon rond qui s’est brûlé les ailes.

En 2008, c’est Emir Kusturica, aficionado de la pépite argentine qualifiée de «Sex Pistols du foot», qui revenait sur son irrésistible ascension, de Boca Juniors à Naples, en passant par Barcelone et la sélection nationale, exaltant la dimension politique du personnage bien marqué à gauche.

Le cinéaste, acteur et musicien Emir Kusturica est un fervent admirateur de Maradona à qui il dédia un documentaire présenté à Cannes.

Autre fameux biopic: «La Mano de Dios» de l’Italien Marco Risi sorti en 2007. Certains cinéastes ont préféré aborder le mythe en filigrane, à l’instar de son compatriote Carlos Sorin qui raconte, dans «El Camino de San Diego» (2006), le voyage d’un jeune admirateur résolu à rallier Buenos Aires où son idole se remet… d’une crise cardiaque. Sur le petit écran, on mentionnera la série Netflix «Maradona au Mexique» (2019) montrant un Diego devenu entraîneur acharné et passionné. Amazon devrait sortir l’an prochain un programme consacré à la star argentine.

Un héros de papier

Le fantasque attaquant a fait couler beaucoup d’encre tant par ses dribbles sur le gazon vert que par ses frasques hors du terrain. «Moi, Diego», le titre d’une autobiographie parue en 2001. 321 pages où le «Pibe de Oro» prend sa plume pour se raconter. Elle ravira surtout les inconditionnels avec force détails sur sa vie personnelle. Autre autobiographie, «Maradona: ma vérité» (2016), 300 pages de confessions sur sa carrière légendaire. Un œil d’expert? Référons-nous au journaliste Alexandre Juillard, auteur de «Maradona» sorti en 2010. Plus récemment, c’est le site So Foot qui livrait en 2019 une œuvre vibrante. «Maradona, fou, génial et légendaire» montre comment le célèbre numéro 10 est devenu le parangon d’un football populaire et universel.

Des chansons à foison

«Si j’étais Maradona, Face à n’importe quels buts, Jamais je ne me tromperais.» Ces paroles sont celles de Manu Chao dans «La Vida Tombola» (2007), l’une des deux chansons que le musicien altermondialiste dédia à l’âme de l’Albiceleste après la remuante «Santa Maradona» produite par son groupe La Mano Negra (1994).

Dans un registre plus apaisé, Benjamin Biolay rendait un hommage subliminal à son idole dans «Borges Futbol Club» avec, en fond sonore, les commentaires enflammés du journaliste Victor Hugo Morales lors du sacre argentin de 1986.

Son pays natal ne fut pas avare non plus de louanges musicales. Citons entre autres hymnes «La Mano de Dios» de Rodrigo Bueno, sans doute la plus célèbre chanson sur l’icône argentine. Et les titres «Maradona Blues» ou «Maradona» des rockeurs Charly García et Andrés Calamaro.

Un homme déifié et statufié

Neuf, c’est le nombre de statues que le dieu du football aurait à son effigie dans le monde selon un site britannique. Les fresques murales sont encore plus nombreuses, la plus délirante étant sans doute celle qui, à Buenos Aires, reproduit la voûte de la chapelle Sixtine, Diego Maradona prenant la place du Tout-Puissant tendant le doigt. A Naples, on ne compte plus les façades arborant la légendaire silhouette qui offrit deux scudetti à la cité du pied du Vésuve.

La fresque réalisée en 2017 dans le quartier de San Giovanni Teduccio à Naples.

Le champion du monde 1986 est l’objet d’un véritable culte. Dans sa patrie, à Rosario, une «église maradonienne» où l’on récite le «Notre Diego» a même été édifiée, fréquentée par tous ceux qui vivent le ballon rond comme une religion. Gageons que la disparition du footballeur ne fera que raviver cette ferveur. «Santa Maradona», jamais tu ne mourras.

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