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Quand manger sain vire à l’obsession

Pesticides, additifs, scandales alimentaires peuvent pousser certains consommateurs à adopter l’alimentation la plus saine possible. Attention à l’excès.

20 avr. 2016, 23:34
/ Màj. le 21 avr. 2016 à 00:01
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Manger sainement, c’est dans l’air du temps. Tout le monde sait qu’il vaut mieux ne pas manger trop gras, trop sucré ou trop salé et qu’il vaut mieux privilégier les produits bios. Les scandales liés à l’alimentation peuvent remettre en question nos habitudes alimentaires. Cela peut renforcer l’envie du consommateur de manger «mieux». Il ne souhaite pas s’intoxiquer avec des additifs, des pesticides ou encore manger un aliment dont il ne connaît pas le contenu exact, ni même la provenance. De manière générale, il est bien de vouloir manger sainement. Il n’y a rien de mal à cela, sauf si cela vire à l’obsession. Chez certaines personnes, tout devient compliqué pour de multiples raisons.

Conduite alimentaire problématique

Cela porte un nom: l’orthorexie. La personne va essayer de bannir de son alimentation tout ce qui peut être toxique pour sa santé et ne consommer que ce qui peut lui apporter des bienfaits et lui éviter des maladies. «Tout aliment est un alicament (aliment et médicament à la fois) pour cette personne. Elle se nourrit idéalement pour se soigner», souligne Janique Parvex, psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, spécialisée dans les troubles alimentaires à l’Hôpital du Valais. «L’orthorexie ne figure pas dans le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) et n’est pas considérée comme une maladie à proprement parler. Elle n’est pas censée avoir un impact sur la santé dans la mesure où la personne mange sainement et ne restreint pas les quantités», précise Janique Parvex. Vous l’aurez compris, l’orthorexique va se préoccuper de manière excessive de la qualité de son alimentation, errant à la recherche du régime idéal. Cette personne va sélectionner rigoureusement sa nourriture en écartant additifs, colorants, conservateurs, etc. Elle peut même aller jusqu’à instaurer certains rituels comme contrôler scrupuleusement le temps de cuisson pour conserver les valeurs nutritives d’un légume ou s’imposer de mâcher 20 fois un aliment avant de l’avaler. «L’orthorexique pense pouvoir réduire les risques par un contrôle accru, qui au final attise la crainte de manger. La personne finit par s’enfermer dans un cercle vicieux, note la psychologue. Cette attitude alimentaire n’a rien d’instinctif. Il s’agit vraiment d’un contrôle excessif et réfléchi. Tout devient compliqué. La personne va tout le temps penser à manger sainement. A chaque invitation chez un membre de la famille ou chez des amis, elle va réfléchir à la qualité de l’alimentation. Elle peut même être méfiante au point d’emporter avec elle son repas ou sa boisson», poursuit Stéphanie Oreiller, BSC diététicienne à l’Association suisse de diététicien-ne-s diplômé-e-s en cabinet privé et coordinatrice de Fourchette verte Valais. Petit à petit, la personne orthorexique va s’isoler. Elle n’aura plus envie de partager un moment convivial autour d’un repas avec sa famille ou ses amis.

Quelques pistes

Nous l’avons dit, les causes sont multiples. Il y a, d’une part, la tendance croissante à vouloir se nourrir sainement, mais ce n’est pas tout. «L’environnement familial peut influencer l’apparition d’un trouble du comportement alimentaire. Pour citer quelques exemples, des attitudes compliquées face à la nourriture en termes de régimes et de culte de la minceur, des règles familiales contraignantes et rigides, voire un manque de cohésion au sein de la famille, peuvent jouer un rôle», souligne la psychologue. Sur le plan individuel, la personne éprouve souvent un mal-être profond. Elle souffre et s’enferme dans ses pratiques alimentaires. Elle est obnubilée par l’idée qu’elle ait pu ingérer un aliment qui va la rendre malade. Elle bannit les excès, sans toutefois réussir à s’empêcher de les pratiquer. Les plaisirs occasionnels comme un petit morceau de chocolat sont interdits… A terme, peut se produire une dérive vers l’anorexie ou la boulimie s’il y a une importante restriction des quantités, ou s’il y a des compulsions alimentaires. Dans les deux cas, l’impact sur la santé de la personne est majeur et il y a un réel danger.

«Quand la personne souffre de ses pratiques alimentaires, que son contrôle excessif prend toute la place, il est recommandé de consulter un psychologue ou un psychiatre, avec le soutien d’une diététicienne», continue Janique Parvex. La psychothérapie peut aider à comprendre et à désamorcer la question du contrôle excessif, à mieux gérer l’anxiété et les émotions associées. Son objectif est aussi de travailler l’image corporelle liée à l’estime de soi. En parallèle, il convient de reprendre les bases de l’alimentation pour retrouver du plaisir à manger et réapprendre à faire confiance à son corps et à ses sensations.

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