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Approvisionnement énergétique: les barrages suisses sont vides à 75%, le risque de blackout existe

Vides à plus de 75%, les barrages ont atteint un niveau record. Ils ne devraient plus être sollicités que lors de situations extrêmes, explique Swissgrid, qui privilégie les importations allemandes. Le risque: un blackout par engorgement.

09 févr. 2017, 16:06
/ Màj. le 09 févr. 2017 à 17:22
Les barrages suisses, comme ici celui d'Emosson, n'avaient jamais été aussi vides.

Un nouveau seuil a été franchi. Au 6 février dernier, la quantité d’eau retenue dans les barrages suisses a atteint un minimum historique avec 26 % de réserve, selon les chiffres de l’OFEN, et 24 % en Valais. Une situation que Swissgrid, le gestionnaire du réseau électrique suisse, observe de très près. Si une nouvelle vague de froid venait à recouvrir l’Europe, les turbines hydrauliques ne tourneraient pas à plein régime afin de garder une réserve. En conséquence de quoi une hausse des importations serait à prévoir et Swissgrid, prudent, ne peut pas exclure une éventuelle défaillance liée à une surcharge du réseau. « L’Allemagne a actuellement un réseau très chargé. Nous n’avons pas l’assurance qu’il n’y aura pas de problème de leur côté » explique Maurice Dierick, le directeur réseau de Swissgrid.

> Lire aussi - Tension sur le réseau durant l'hiver 2015/2016

 

Le taux de remplissage des barrages suisses n'est pas à son minimum, mais pour début février, c'est un record, comme le montre ce diagramme de l'Office Fédéral de l'Energie (OFEN).

 

Blackout par surcharge

Alors que se passerait-il si une nouvelle vague de froid venait à recouvrir l’Europe, comme il y a quelques semaines ? Du côté valaisan, on se veut rassurant. « La consommation d’électricité est moins importante depuis quelques jours et il nous reste encore 120 millions de m3 d’eau sur 400 dans le barrage de la Grande Dixence. Il n’y a aucune raison de se faire du souci » relativise Amédée Kronig, le directeur de Grande Dixence SA et président de l’association valaisanne des producteurs d’énergie (AVPEE). « De plus, nous avons l’obligation d’importer du courant si nous n’en avons pas assez pour couvrir les demandes. Avec les centrales nucléaires françaises à l’arrêt, nous importerions essentiellement de l’énergie allemande » continue-t-il. Pas de blackout en perspective, donc. Du moins, pas pour ces raisons-là.

 

 

Il existe plusieurs zones de congestions sur le territoire suisse, indiquée ici en rouge. Ces "goulets d'étranglement" peuvent être la cause d'un blackout, si trop d'énergie était injectée en même temps à ces endroits-là. (source: Swissgrid)

 

Au niveau européen, la production électrique peut supporter une nouvelle vague de froid. 12 centrales nucléaires françaises sont encore à l’arrêt, mais selon l’Autorité de Sureté Nucléaire française (ASN), neuf d’entre elles devraient redémarrer dans les jours qui viennent. La centrale de Flamanville en Normandie, qui a connu hier matin une explosion sans risque nucléaire, ne devrait être rouverte que fin 2018.

Ce diagramme représente la différence qu'il existe actuellement entre le niveau d'eau dans les barrages suisses et la moyenne des années précédentes. Comme on le voit, plus les jours avancent, plus l'écart se creuse. (source: Swissgrid)

 

Les centrales à charbon allemandes ont le potentiel pour fournir toute l’Europe en électricité, explique Philippe Jacquod, professeur HES spécialisé dans l’efficience énergétique. En cas de grand froid, le problème viendrait plutôt d’une potentielle instabilité du réseau. « Si d’énormes flots traversent le réseau européen, il peut y avoir des surcharges de ligne. Un goulot d’étranglement peut générer un blackout généralisé sur toute l’Europe, connectée au même réseau. Dans ce cas-là, il faudra faire comme avec l’Italie en 2003, leur couper les lignes avant que le blackout ne se répande ».

Suite à la fermeture de la centrale de Leibstadt, les risques d’engorgement seront encore plus fréquents. Une question à laquelle devra répondre la Stratégie Energétique 2050. « Il faut foncer dans cette stratégie en étant moins timide à installer des panneaux solaires par exemple. Surtout qu’économiquement, ils deviennent compétitifs » conclut le professeur.

> Lire aussi - La Stratégie Énergétique 2050 moins ambitieuse que prévu

Rentabilité par pics

A l’heure actuelle, la production hydroélectrique n’est rentable qu’en cas de pics de consommation, lorsque le prix de l’énergie grimpe soudainement. « Lors de la vague de froid de fin janvier, le prix des pics a fortement augmenté. En France et en Belgique, les tarifs ont été parfois décuplés pour atteindre 1 euro le kw/h. C’est énorme. » souligne Philippe Jacquod. C’est uniquement lors de ces pics de consommation que l’énergie hydraulique valaisanne devient rentable.

Assécher les barrages, ou non, ne dépend pas uniquement d’un simple calcul de rentabilité. Des questions de sécurité et de planification entrent aussi dans l’équation. Philippe Jacquod continue. « Il y a évidemment des règles pour conserver une partie du potentiel hydroélectrique, afin de bénéficier d’une réserve. De plus, la vente de l’énergie hydraulique hors des pics de consommation se ferait à perte et il n’y aurait plus la possibilité de gagner de l’argent sur les futurs pics ». Si une nouvelle vague de froid recouvrait l’Europe, les barrages tourneraient à plein régime. Ils pourraient participer à l’effort européen de production et ainsi éviter un blackout par surcharge localisée.

>A lire - "Le risque est moins important qu'en 2016"

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